Au Squig Boiteux, la Salle Commune

Un chevalier aux cheveux blancs arriva dans la taverne, couvert de sang. Visiblement ce n'était pas le sien puisqu'il semblait en pleine forme et souriant.

- Ah, on a massacré toute une bande de gobelins dans la Reikwald. A mon avis ce n'était que l'avant-garde d'une armée plus g...

Au grand dam de Laconfir qui était prêt à sortir sa réplique préférée, Dangorn s'interrompit soudainement en apercevant Nadrong et Alana parler à un nain en piteux état. Curieux, il s'approcha. Ce n'est qu'en arrivant à moins de deux mètres de Mordrep qu'il le reconnut.

- Ventregris ! Mordrep Hurletonnerre ! Alors, que deviennent les Forge Rancunes ?
- Apparemment ils sont presque tous morts ou disparus à part lui, lui transmit Nadrong, d'un air sombre. Le tavernier se retourna vers Mordrep et accepta la chevalière. On a des chambres, t'en fais pas mon gars. Avec ça, t'as de quoi rester un bout de temps dit-il en montrant la bague en or. Tu vas t'retaper une santé et on va voir c'qu'on peut faire pour toi.
- Nadrong a raison, ces temps-ci la guerre est partout, il y a de l'or à gagner pour tout mercenaire. Et l'avantage avec un ancien c'est qu'on économise la formation. Je vais en parler à Dietfried. Dangorn sourit. Si tu lui racontes ton histoire il se laissera peut-être convaincre.

Mordrep, mine basse adressa un sourire à Alana et tout en tapotant l'épaule de Nadrong pour le remercier il adressa d'une voix faible :
- Tient v'la une elfe... Que j'aime bien.
Aussitôt dit Dangorn entra dans la pièce posant des questions, et Mordrep opina la réponse de Nadrong.
- A la compagnie tout est resté intact, il y avait même une marmite pleine au dessus du feu éteint. Et la hache d'Urvan (serre le poing)
Puis il soupira avant d'ajouter :
- Par Morgrim, quel bonheur de retrouver la chaleur de ses frères... Je vous remercie tous, et j'accepte de rencontrer Dietfried.

"Tu n'auras pas à attendre trop longtemps ami nain !" S'exclama Dietfried en esquissant un sourire fugace tandis qu'il descendait les marches de l'escalier qui menait aux chambres à l'étage. "Quel bon vent vous amène dans notre cher établissement?"

Comme à son habitude Dietfried avait troqué son armure pour une tenue plus modeste. Une soutane sans ornement ni fioriture. A sa ceinture était sanglé un petit livre relié à la couverture usée par les années, ainsi qu'une chope en étain de facture naine.

D'un geste de la tête il salua Nadrong et Alana puis vint se camper devant Mordrep.

"Je suis ravi de vous revoir, Mordrep. Cela fait déjà quelques mois que je ne vous avez pas revu. C'était où déjà? Au Pays des Trolls il me semble bien... Je commençais à craindre qu'il ne vous soit arrivé malheur."

Dietfried lissa le devant de sa soutane et invita Mordrep à s'asseoir à l'une des tables.

"Bon trêve de bavardage, le temps est un luxe que nous n'avons pas, donc venons en aux faits. Vous souhaitiez vous entretenir avec moi, c'est cela? Je vous écoute."

Par habitude, Mordrep se leva difficilement et salua respectueusement le capitaine, puis se rassit.
- Bien comme je l'expliquais tantôt, en bref, je suis partit en mission personnelle dans le haut col. Après des mois désastreux et un echec je me suis mis en route pour un long voyage de retour, a cours de vivre et affaiblit. Ma surprise fut grande lorsqu'arrivant épuisé au village des Forges Rancunes tout était abandonné tel quel, depuis longue date.
J'ai alors fait route vers mes seuls autres amis connus, et heureusement ramassé par un voyageur en charrette au passage.
Je ne sait pas ce qu'ils sont tous devenus, la compagnie en tout cas est morte.
(tousse)
De retour ici je fut accueillit comme un frère et mes anciens camarades me proposaient de réintégrer les rangs. Après trois bon jours de sommeil et quelques livres de viande je devrais avoir recouvré mes forces et pouvoir vous servir comme antant.
Si toute fois capitaine, vous ne m'en voulez pas de vous avoir quitté, pour fonder un clan autonome.
Puis regardant ses mains...
- Mmh, et après un passage chez un bon guérisseur, mes doigts bougent mais sont insensibles. Si je n'avait pas pissé dessus régulièrement ils seraient morts.
Mordrep esquissa un demi sourire à l'elfe en disant cela.

Dietfried écouta attentivement Mordrep lui raconter les évènements des mois précédents. Une fois que ce dernier eu fini son récit il laissa planer le silence quelques instants puis repris la parole.

"Je suis peiné d'apprendre que les forges rancunes aient disparus, ils étaient d'anciens mercenaires et même s'ils ont renié leur serment je sais que beaucoup de mes hommes les appréciaient.

Mais malheureusement les guerres apportent leurs lots de mauvaises nouvelles et il ne faut donc pas se laisser abattre sinon nous ferions mieux de nous rendre directement. Surtout qu'à l'heure où nous parlons l'ennemi foule nos terres et saccage tout ce qui se dresse face à lui.

Donc je ne vous cache pas mon ami que tout volontaire est accepté. Donc j'espère vous voir au plus vite rétabli et prêt à nous accompagner sur le front."

Mordrep opina :
- Avec honneur capitaine, je saurais faire oublier que je fut partit un jour.
Je vous expliquerez ma mésaventure plus en détail un de ces soirs.
Puis l'ingénieur sourit à ses compagnons :
- Promis je n'expérimenterais plus mes gadjets dans la taverne !... Plus sérieusement, que Valaya vous bénisse tous car votre noblesse est grande que toujours nous sommes restés frères.

"La confrérie c'est peut être agrandie, beaucoup des anciens sont tombés au combat ou bien sont parti pour vivre leurs propres aventures, des nouveaux venus ont franchi le seuil de cette auberge et ont su se tailler un nom, mais une chose n'a pas changé, et c'est bien cette chose qui a permis à notre confrérie de subsister en des périodes troublées c'est la fraternité.

On peut nous cracher dessus, on peut nous insulter, on peut répandre les pires calomnies, mais cela nous importe peu car la seule chose qui compte réellement c'est la confrérie. Et quoi que l'on puisse dire le jour où notre étendard sera foulé n'est pas encore venu."

Devant un Mordrep qui ne devait pas forcément comprendre ce qui se passait Dietfried était parti dans un discours passionné rythmé par son poing cognant sur la table.

Depuis qu'il avait pris la relève de Drugnalf, il n'avait eu de cesse de se battre pour démontrer aux yeux de ceux dont il avait pris le commandement qu'il serait digne de la tâche qui lui avait été imposé et depuis c'était formé un véritable attachement et chaque perte devenait d'autant plus dure pour lui.

Ainsi revoir venir un "ancien" mercenaire l'avait réconforté dans sa tâche.

"Mercenaires buvez tant que vous le pourrez ! Ce soir c'est moi qui régale !"

A peine Dietfried eut-il fini sa phrase que Dangorn courut vers le bar, à une vitesse étonnante malgré le poids de son armure qui habituellement le ralentissait sur le champ de bataille, en bousculant les poivrots qui y étaient déjà accoudés. La masse de mercenaires ne tarda pas à faire de même.

Nadrong eu un sourire en coin. Finalement cette soirée risquait d'être très profitable pour ses finances.